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Mardi 12 novembre 2019, 22 heures.

Dans la cage d’escalier du bateau sous les toits des bruits de pas, de paroles, résonnent. Je ne suis pas si seule. Je viens d’aller voir sur le pont : la pleine lune est cachée par les nuages. Il y a quelques minutes, il y avait quelques gouttes, presque rien. Les cœurs de mes livres sont ouverts sur le sol. Je n’ai plus de marques-pages, je lis trop de livres en même temps. Tout peut faire marque-page me direz-vous. J’aime aussi ne point les refermer, je vous répondrais. « Le livre ouvert » de Paul Eluard l’est à la page 77, au poème « Pour vivre ici ». « Pour vivre ici / Je fis un feu / L’azur m’ayant abandonné / Un feu pour m’introduire dans la nuit d’hiver / Un feu pour vivre mieux (…) Je vécus au seul bruit des flammes crépitantes / Au seul parfum de leur chaleur / J’étais comme un bateau coulant dans l’eau fermée, / Comme un mort je n’avais qu’un unique élément. » J’entends l’enfant dormir, sa respiration profonde ; à intervalles réguliers, des voitures passer, tout en bas. Ce bateau d’où j’écris, outre le fait d’être sous les toits, est fait de bois et de pierres, et les pierres sont apparentes. Bien assise dans ma chaise pliable pour écrire ces notes à la machine, il y a des cartes postales tout autours faisant mon décor : une sculpture d’un couple dansant une valse, un enfant au pâté de sable, une sainte trinité, une femme rousse à la poitrine nue dans un fauteuil ocre, un personnage androgyne au visage caché par son béret, plongé au cœur d’un livre. Dans mon dos, il y a un tableau : c’est une vue sur la Seine et des ponts de Paris. C’est une lithographie. Je le transporte dans toutes mes habitations depuis des années. Il est dédicacé : « Pour la gentille Sacha ». Pour vivre ici / J’inventais un bateau / L’île m’ayant abandonnée / Un bateau pour aller sur une autre rive / Un bateau pour vivre mieux. (…) Je vécus au seul bruit de la musique de l’eau et de la pluie / Au seul parfum de son odeur / J’étais comme un feu brûlant en plein océan. 


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